Le Différend
- Type:
- boek
- Titel:
- Le Différend
- Jaar:
- 1983
- Onderwerp:
- 20th Century (1901-2000)
Philosophy
Postmodernism
France - Taal:
- Frans
- Uitgever:
- Paris Les Éditions de Minuit 1983
- Plaatsnummer:
- ORPH.PHI LYOT a (Orpheus Instituut)
- ISBN:
- 9782707306616
- Paginering:
- 287 pages
- Samenvatting:
- La pensée de Lyotard est difficile à classer; on la place souvent au carrefour de la philosophie, de la linguistique et de la critique littéraire. Lyotard a d'ailleurs participé à toutes ces sphères du savoir contemporain, et on l'associe souvent à la discipline de la littérature comparée. Dans la lignée de Roland Barthes, Jacques Derrida et de la critique du concept d'auteur, Lyotard écrit une fable postmoderne, véritable ? critique du sujet ?. Il a par ailleurs travaillé sur la question du négationnisme.De tous ses livres, un ouvrage semble occuper un lieu particulier dans l'?uvre: en quatrième de couverture du Différend, Lyotard en parle comme son ? livre de philosophie ?. Cet essai se place ostensiblement dans la catégorie de la philosophie du langage. Lyotard, qui y met en cause la "présence" du sujet moderne de la connaissance (dont il avait montré le ? métarécit de l'émancipation ? dans La Condition postmoderne : rapport sur le savoir) dit qu'au départ ? il y a une phrase ? : on ne sait ni qui la prononce, ni ce qu'elle dit, ni à qui elle est adressée. La phrase est la figure par laquelle se fonde sa vision du langage et des rapports qu'il entretient avec la pensée.Lyotard ouvre son propos sur la question du négationnisme, prenant l'exemple de Robert Faurisson, qui nie l'existence même des chambres à gaz. Lyotard interroge alors le concept de témoignage et sa relation avec l'entreprise de destruction systématique des juifs d'Europe, ainsi que le rapport entre témoignage, histoire (des historiens), (dé)négations de l'histoire historienne et des témoignages, (im)possibilité de témoigner pour le ? musulman ?, etc. Il montre ainsi ce qui sépare le témoignage impossible de sa propre destruction de la science historienne. Influencé par les réflexions de Primo Levi, ces interrogations au sujet du témoignage ont été reprises par Giorgio Agamben. De cette prémisse découle tout le reste de son propos, qui met en cause les grandes présuppositions de la pensée moderne et annonce le besoin de nouveaux paradigmes.En général, la pensée occidentale moderne présuppose la possibilité d'un consensus sur certains référents "extra-textuels" (le temps, l'espace, la loi, la justice, l'être, etc.), des référents qui existent en dehors de leur présentation dans une conversation, un texte écrit ou un document audio-visuel. Lyotard soutient que le statut "extra-textuel" de ces référents est problématique et qu'il n'existe pas de plate-forme universelle sur laquelle penser l'émergence et l'historicité de ces référents, qui doivent toujours être présentés dans une phrase qui en invente le concept, en quelque sorte. Pour que la phrase "la séance est levée" ait un sens, il faut qu'une autre phrase ait contextualisé les concepts de "séance" et de "lever une séance"; ces deux concepts ne vont pas de soi, ne sont pas des objets susceptibles d'être saisis par une conscience universelle; ils sont toujours propres à un certain discours.Lyotard insiste beaucoup dans le Différend sur le concept de "jeux de langage", qu'il emprunte au philosophe autrichien Ludwig Wittgenstein, un penseur qui, bien qu'associé à la philosophie analytique anglo-saxonne, s'en démarque par son refus (dans les Investigations philosophiques, notamment) de certains "éléments simples" donnés a priori.Le langage n'est pas un objet statique qu'on pourrait définir a priori. Il est plutôt composé de certains jeux, dont les règles changent à mesure que leurs participants y portent des coups. "Raconter", "juger", "interroger", "analyser" sont tous des jeux différents qui ont leur règles propres. Lyotard soutient qu'il n'existe pas de plate-forme universelle où on pourrait juger de tous ces jeux de langage. Dans toute phrase, il y a inévitablement un "différend". Un discours savant, inscrit dans le jeu du savoir positif, ne pourra pas "s'entendre" avec un discours de l'expérience phénoménologique, ou d'une expérience ésotérique, qui ont tous deux droit de cité dans la pensée contemporaine.De même, pour reprendre son exemple tiré du discours marxiste, le travailleur qui fait face au patron subira un "tort" si sa force de travail est traitée comme une marchandise, puisque, pour le travailleur, ce travail fait partie de son être, de son expérience de vie, et qu'on fait violence à cette expérience en l'assimilant à un objet pouvant être marchandé, exploité pour du profit. Le jeu de langage du patron fait subir un tort au discours du travailleur si ce dernier n'a pas les moyens de faire valoir son point de vue. La discussion de ces deux jeux ne peut pas se faire dans un espace neutre, un espace du "litige" où une règle universelle permettrait de trancher le débat.Pour Lyotard, le litige est une fiction moderne; elle procède de l'illusion d'un espace en dehors de l'histoire, en dehors de l'idéologie, l'espace que semble présupposer un grand pan de la philosophie analytique du XXe siècle. Le langage procède plutôt du "différend": la phrase qui présente la "cause" (qu'on doit comprendre ici dans le contexte d'un procès) est toujours intéressée et historique; elle répond toujours aux impératifs d'une certaine "perspective" qui fera tort aux perspectives qui lui sont opposées.Lyotard insiste, en terminant, sur l'importance de donner droit de cité à des discours, des nouveaux "jeux de langage", qui permettent aux nouveaux torts de se dire et de s'écrire. L'essai porte avec lui une vision politique manifeste qui n'est jamais portée à l'avant-plan, et qui pourtant en constitue le prétexte (une caractéristique propre à d'autres textes lyotardiens comme Discours, figure, La Condition postmoderne ou L'Enthousiasme où il positionne le savoir comme une arme idéologique).
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